Solidarité et individualisme

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Comment prendre soin de nos besoins ?

À certains moments dans l’histoire, on s’est offert en tant que peuple, la possibilité de prendre soin des gens, en créant des organismes sans buts lucratifs. Certains d’entre nous rayonnent d’empathie en se positionnant au service des autres.

J’ai beaucoup de gratitude aujourd’hui pour ces gens qui se sont donné comme mission d’éclairer les zones sombres de notre société. Des sujets encore tabous, des groupes de personnes qui ne cadrent pas dans notre idéal, ces fausses images de perfection et de normalité. Ceux qu’on tente trop souvent de faire taire, ceux qu’on refuse d’admettre leur existence, ceux qu’on écarte violemment de notre trajectoire, bref l’inconnu qui nous fait peur et qu’on préfère cacher, blasphémer, trahir, plutôt que d’admettre lucidement et sagement qu’ils font partie de notre ensemble et que la diversité est un atout pour le peuple. Ces organismes agissent de façon extrinsèque sur les individus.

Dans quel état serait notre pays, si ce concept de solidarité devait être enseigné très jeune à nos enfants et cultivé tout au long de nos vies afin que l’«agir ensemble» soit intrinsèque à chaque citoyen.

Ces jours-ci au Québec, on parle d’inclusion plus que jamais. J’ai pourtant l’impression qu’on en parle plus qu’on agit. On intellectualise beaucoup par la voie des médias, mais il n’y a pas suffisamment de réels débats qui font avancer les choses. Ça manque à notre culture. Nous nous indignons plus rapidement que l’ombre de Lucky Luke. Certaines indignations passent comme un courant d’air alors que d’autres font les gros titres plus longtemps. Le changement est lent. Bien sûr que nous devons continuer de dénoncer et de s’indigner devant les injustices, mais ne serait-ce pas plus efficace si nous le faisions en ayant pour objectif de trouver des solutions universelles plutôt que de livrer combat un contre l’autre avec l’impression toujours que nous sommes les gentils héros et les autres les vilains?

Trop souvent les humains que nous sommes ont tendance à encourager la polarisation et les duels. Pourtant je suis convaincu que nous sommes aussi capables de neutralité, d’équité, d’égalité et de solidarité.

C’est déconcertant de lire les refus du ministre de changer les toilettes de nos institutions publiques pour des toilettes mixtes, alors qu’il existe des solutions simples. Ce sujet retient particulièrement mon attention aujourd’hui, concernant le concept de dualité et de polarité. C’est tout autant déconcertant de lire tout ceux qui s’indignent devant le fait que ce ne soit pas déjà fait.

On retrouve dans le coin gauche, ceux qui veulent créer des règles générales pour les exceptions et nous avons dans le coin droit, ceux qui refusent de se plier à la minorité par peur de déplaire à la majorité et perdre des votes.

On parle du malaise des gens à entrer dans une toilette pour fille ou pour garçon. On ne parle pas du mal-être et du manque d’ouverture d’esprit des duellistes. On n’en parle pas, donc on n’admet pas la peur de l’inconnu et du changement ou tout autre sentiment non avoué, vécu discrètement. Du côté gauche, on ne reconnaît pas ces tendances à militer pour des causes qui nous permettent de faire passer nos propres frustrations, nos colères, nos ressentiments qui proviennent de blessures bien ancrées et non guéries. Tout ça est malsain. Si chaque individu peine à adresser ces ressentis, c’est la société qui en souffre à partir du moment où on offre une tribune à ces humains déboussolés. Bien sûr je généralise, il y a des nuances.

Pourtant, une idée m’est venue en vous lisant. Si on pense en dehors de la boîte un peu, on peut facilement remarquer qu’on y trouve beaucoup plus d’options que le oui ou le non. En parallèle, de grâce, débutez ou poursuivez votre cheminement personnel au quotidien, soit en thérapie cognitivo-comportementale, spirituelle ou tout autre soin qui vous convient pour le bien de tous ceux qui vous entourent. 🙂

Dans ce conflit des toilettes mixtes, j’observe déjà d’autres «besoins» pour lesquels la solution de modifier nos toilettes serait utile. Parfois il suffit de changer le point de mire pour mieux voir ce qui est évident. Il se passe beaucoup de choses dans les toilettes de nos écoles secondaires, vous savez? À l’abri des regards des surveillants et de la direction, on discrimine, on intimide, on s’y prostitue, on vend et on consomme des drogues, comme la wax, et pour les plus timides et sur une note plus légère, on réprime un besoin primaire d’évacuer (avouez que vous vous retenez de faire du bruit vous aussi quand des gens entrent dans la toilette).

Mettons l’accent sur l’architecture pour trouver la solution à ces problèmes. Hormis la question pour ou contre, des salles de bain mixtes peuvent très bien avoir des comptoirs de lavabos face au corridor, derrière lesquels on trouverait des cabines, toutes identiques, confortables pour accueillir des fauteuils roulants et toute autres commodité inclusives. Ces cabines seraient munies d’une ventilation fortement efficace et silencieuse et de murs suffisamment insonorisés. Les portes ne seraient plus flottantes comme dans les petites cabines actuelles, mais de bien bonnes portes pleines et insonorisées. Des caméras pourraient alors être installées dans la zone lavabos pour assurer une certaine sécurité ou non puisque ce serait déjà à la vue de tous. L’intimité des gens dans leur cabine serait préservée, ce qui présentement n’est pas le cas dans aucune des toilettes d’école.

Pourquoi est-ce qu’on ne conçoit pas de système qui serait simplement celui qu’on aimerait nous-mêmes utiliser? Je pense à cette éducatrice en garderie qui demandait à ma fille (en apprentissage) de faire pipi et caca sur les petits pots qui étaient tous installés en rangée le long du mur. Vous devinez que ma fille a eu des problèmes de constipations qui nous ont causé beaucoup d’angoisse. Quand on a compris le problème, on a posé la question à l’éducatrice si elle était à l’aise de faire ses besoins devant tout le monde comme elle l’exigeait des enfants. On a vite eu gain de cause et ma fille pouvait alors aller dans la toilette comme les adultes.

Je demande au ministre de l’Éducation du Québec, s’il est à l’aise d’aller faire ses besoins dans les toilettes de nos écoles ?

Est-ce que l’éducatrice et le ministre sont solidaires aux besoins des autres ou sont-ils sous l’emprise de l’individualisme depuis trop longtemps ?

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